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Dentelles lunaires 2007 atelier ouvert  avec artistes asso Manufacture art Bordeauxphoto P

La Saimeuse , Dentelles lunaires in situ, 2007 Bordeaux

© Patrick Polidano

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Démarche « Mets mots » par Cécile hARTL

- Qu’est-ce qui vous met l’eau à la bouche ?


- Les ouvrages (littéraires, jardinés et plastiques) de Gilles Clément. Les livres de Marielle Macé, Tim Ingold, Emmanuel Coccia, Pierre Lieutaghi, . Les émissions « l’art est la matière » de Jean de Loisy sur France Culture- en direct ou en podcasts- Les expositions de Giuseppe Penone, Hubert Duprat et Andy Goldsworthy. Marcher sur les chemins en étant cernée par les adventices et les insectes, écouter le chant des oiseaux à 6h du matin, suivre la courant d’un ruisseau pour sentir les frémissements de l’onde, parcourir la montagne Saint Victoire en suivant le chant des cigales sur les pas de Paul Cézanne et les sentiers des douaniers avec l’océan pour horizon…


- C’est quoi votre madeleine ?


- Le jardin de de Claude Monet à Giverny, j’avais 14 ans, j’ai découvert les arts plastiques par le biais des jardins. J’étais émerveillée par la profusion des iris, des glycines, des nénuphars. Quand j’ai vu pour la première les toiles des Nymphéas au musée de l’Orangerie, à Paris à 17 ou 18 ans, j’ai pleuré. Quand j’ai découvert le lieu où Monet commandait les nénuphars, au domaine de Latour-Marliac au Temple sur Lot, ce premier choc a resurgi.


- Pour quoi mettez-vous les bouchées doubles ?


- Pour repérer et documenter un parcours dans des jardins, des paysages en tant qu’animatrice au sein d’associations écologiques, culturelles et artistiques de découvertes du végétal, par l’expérience et l’éveil des sens, pour rencontrer des artistes, faire l’expérience des œuvres, lire beaucoup, concevoir et rédiger mes cours, cuisiner…et pour mettre en œuvre une exposition car il faut tout concevoir et réaliser (les œuvres, mais aussi toute la communication autour pour diffuser : c’est chronophage).


- Quand buvez-vous du petit lait ?


- Quand je parcours un jardin, un parc, je suis sensible à la manière dont on peut jouer avec le vivant et comment le vivant peut se jouer de nous. Le mélange du « sauvage » et de l’artificiel me séduit: J’aime particulièrement les domaines du Rayol (Hyères), de Boisbuchet (Lessac), le Moulin de la Souloire (Gironde) etc…


- Quand restez-vous sur votre faim ?


- En l’absence de poésie, de musicalité, d’insolite, d’échanges


- Qu’est ce qui peut provoquer la soupe à la grimace ?


- Le green washing et les vernis de la bienséance !


- Qu’est-ce qui vous fait mettre les pieds dans le plat ?


- Les préjugés sur l’art et sur le vivant « les mauvaises herbes » ou « les nuisibles » !


- A qui pourriez-vous servir la soupe ?


- A tous ceux et celles qui sont invité.es à ma table : velouté d’asperges aux fleurs d’ail des ours ; délice de betterave à l’anis vert, douceur de courges, etc… J’apprécie les liens entre différents végétaux (fruits, feuilles, fleurs, graines) tant à ma table que dans mon travail plastique.


- Depuis quand avez-vous du pain sur la planche ?


- Depuis que je suis professeure et artiste ! Suite à ma rencontre avec une œuvre de Marie Ange Guilleminot Mes poupées, à Castres en 1993, j’ai fait des parures corporelles -c’est-à-dire des enveloppes- car ce qui guide mon expérience c’est le principe de l’haptique « le toucher des yeux » et de l’incorporation : porter à la bouche, prendre en main, frôler, semer, …c’est ce que je propose aux regardeur.es …

Mais avec le végétal, tout a vraiment commencé en 1998, je suis arrivée en Gironde dans une maison à la campagne avec un vaste jardin et j’ai vu surgir partout des lunaires : la métamorphose de la plante du printemps à l’été m’a fasciné : je l’ai beaucoup observé, cueillie. J’ai écrit sur elle, puis j’ai commencé à façonner des objets avec les différentes parties qui la composaient : graines, siliques. C’est la suite de l’aventure avec le végétal…depuis Giverny… J’avais rencontré quelques années auparavant un érudit collectionneur fabuleux qui m’a fait confiance et qui m’a encouragé à créer en me proposant des résidences au sein de sa fondation à Jarnac puis à Gijon (Asturies) : Pour Artransmedia 2002, j’ai distribué pour la première fois de petites enveloppes blanches contenant des graines de lunaires et instauré un protocole pour un troc planétaire grâce à la fondation D.A.N.A.E (Diffusion Attitudes Art Actuel Europe) et Acindino Quesada à qui je dois beaucoup.
En 1999 j’enseignais au collège et au lycée et depuis 20 ans je suis professeure à l’université de Bordeaux et souvent je suis comme le lapin blanc… de Lewis Caroll.


- Pensez-vous que les carottes sont cuites ?


- Je ne suis pas fataliste, mais je cherche à être informée pour mesure l’ampleur de la catastrophe. Je fais confiance à la minorité agissante et j’agis à ma petite échelle en exposant, en rencontrant, en écrivant, en provoquant !


- Avez-vous un cœur d’artichaut ?


- Pour les animaux : je résiste difficilement au passage d’un lépidoptère, d’un chat, au chant du merle et à l’audace du rouge-gorge, je rêverais de pouvoir suivre la migration des grues… et avec les plantes : tailler, élaguer m’est difficile…


- Est-ce vraiment dans les vieilles marmites qu’on fait les meilleures soupes ?


- Le meilleur couscous que j’ai mangé au Maroc était fait de beurre rance !
Je suis curieuse des saveurs, des parfums et toujours à la recherche des liens insolites à provoquer. J’ai une « addiction » aux coquelicots, aux pâquerettes, à la mélisse, au sureau, au robinier…que je cueille pour les cuisiner ou pour les faire sécher : formes, parfums, saveurs, couleurs : je n’y résiste pas !


- Et la cerise sur le gâteau ?


- Quand je prépare une exposition, comme pour Alice aux Pays des merveilles, le présent se mêle au rêve !


- Le mot de la faim ?


- « Tu ne seras jamais perdue si tu suis la graine qui a été semée » proverbe aborigène.

Cécile Hartl, La Saimeuse

à Eysines Maison Atelier Jardins des Attentions, le 6/05/23 modifié en février 2024.

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